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La limite d’exposition des travailleurs à l’amiante, c’est 10 ou 100 fibres par litre ?


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Le gouvernement semble maintenir pour l’instant une valeur limite d’exposition professionnelle de 100 fibres par litre d’air inhalé, alors qu’elle devait être abaissée.

Dans un souci de protection des professionnels amenés à réaliser des travaux sur des matériaux contenant de l’amiante, les employeurs ont l’obligation de veiller à limiter l’exposition au danger de leurs salariés. La personne doit ainsi être équipée, a minima, d’équipements de protection individuelle (EPI) (vêtements à usage unique, gants étanches, chaussures ou bottes décontaminables, demi-masque ou APR, etc.) dont la liste varie selon le niveau d’empoussièrement de l’air par rapport à la valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP) (Arr. 7 mars 2013, NOR : ETST1306549A : JO, 14 mars).

Une VLEP de 10 f/l qui subsiste

En principe, depuis le 1er juillet 2015, la VLEP a été divisée par 10 et est passée à 10 f/l (fibres/litre) d’air inhalé sur 8 heures de travail, contre 100 f/l auparavant. C’est en tout cas ce qu’il résulte de l’application de l’article R. 4412-100 du code de travail dont la rédaction a été modifiée par le décret n° 2012-639 du 4 mai 2012. Par conséquent, les trois niveaux d’empoussièrement, définis par l’article R. 4412-98 du même code en fonction de la VLEP à laquelle cet article renvoyait jusqu’à présent, devraient être les suivants :
– 1er niveau : valeur inférieure à la VLEP(10 f/l) ;
– 2e niveau : valeur supérieure ou égale à VLEP(10 f/l) et inférieure à 60 × la VLEP (600 f/l) ;
– 3e niveau : valeur supérieure ou égale à 60 × VLEP (600 f/l) et inférieure à 250 × VLEP (2 500 f/l).

L’article 5 du décret de 2012 avait pris soin de reporter l’entrée en vigueur de la nouvelle VLEP au 1er juillet 2015 afin de laisser du temps aux entreprises et aux fabricants d’EPI de s’y conformer. Cette application différée avait d’ailleurs été validée par le Conseil d’État saisi d’une requête en annulation de la mesure transitoire figurant dans cet article 5 (CE, 23 oct. 2013, n° 360731).

Nouveaux niveaux d’empoussièrement : seuil de 100 f/l

Toutefois, il semble que le gouvernement ait décidé de maintenir l’ancienne valeur en rectifiant la rédaction de l’article R. 4412-98. Un décret du 29 juin 2015, entrant en vigueur le 2 juillet 2015, vient en effet de fixer les nouveaux niveaux d’empoussièrement de la manière suivante :
– 1er niveau : empoussièrement dont la valeur est inférieure à 100 f/l ;
– 2e niveau : empoussièrement dont la valeur est supérieure ou égale à 100 f/l et inférieure à 6 000 f/l ;
– 3e niveau : empoussièrement dont la valeur est supérieure ou égale à 6 000 f/l et inférieure à 25 000 f/l.
Or le décret en question n’a modifié ni la rédaction de l’article R. 4412-100 du code du travail qui définit toujours la VLEP à 10 f/l, ni l’article 5 du décret du 4 mai 2012 qui a fixé son entrée en vigueur au 1er juillet 2015. Deux VLEP coexisteraient par conséquent.

Une coexistence de valeurs perturbante

Certes, on pourrait désormais dissocier les deux articles en question, l’article R. 4412-98 relatif aux niveaux d’empoussièrement et l’article R. 4412-100 liée à la VLEP, puisque le premier ne renvoie plus expressément au second pour définir les risques d’exposition à l’amiante. Mais le décret du 29 juin 2015 modifie également l’article R. 4412-110 du code du travail qui, dorénavant, précise que, selon les niveaux d’empoussièrement définis par les articles R. 4412-96 et R. 4412-98, l’employeur met à la disposition des travailleurs des EPI adaptés aux opérations à réaliser et, nouveauté, « assurant le respect de la valeur limite d’exposition professionnelle ». Donc, incidemment, le gouvernement a voulu relier les niveaux d’empoussièrement conditionnant la nature des EPI à la notion de VLEP.
On peut espérer que le ministère du travail apportera très prochainement plus d’informations sur la portée de ce texte et la coexistence de ces différentes valeurs, même si on peut penser que les employeurs opteront le plus souvent pour le principe de précaution et respecteront la VLEP de 10 f/l maintenue dans le code du travail.

Bruno Pérot
Dictionnaire permanent Construction et urbanisme

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