La lutte contre le changement climatique, qui incite naturellement à se tourner vers les énergies renouvelables, va avoir un impact important sur les métiers de l’électricité. En effet, à quelques expériences près, l’électricité représente l’énergie « universelle » pour remplacer des usages qui, jusqu’à présent, faisaient appel à des solutions dites thermiques : chauffage, véhicules, eau chaude sanitaire… En outre, les électriciens sont les acteurs naturels des nouveaux marchés qui émergent ces dernières années, comme la domotique et la fibre. Le point sur ces nouvelles opportunités de marchés avec Philippe Rifaux, Délégué Général de la FFIE.
Quelles sont les dernières évolutions des marchés porteurs pour les électriciens ?
Concernant l’autoconsommation en photovoltaïque, le marché est porté par le fait que tout projet en neuf doit désormais intégrer une part d’ENR. Les électriciens y ont donc toute leur place et peuvent proposer des solutions. C’est un marché à fortes opportunités, même si son intégration doit passer par des formations indispensables du personnel, par une qualification de l’entreprise, et nécessite de travailler en lien avec d’autres entreprises (notamment en étanchéité et en couverture). C’est un marché prometteur si on ne le casse pas avec une réglementation trop rigide, et qu’on n’y laisse pas se multiplier des acteurs peu scrupuleux qui nuisent à l’image du métier.
Sur la domotique, nous avons réalisé une enquête auprès de nos adhérents, qui laisse apparaître un marché déjà bien développé qui représente en moyenne 30% de leur CA. C’est un marché global, réparti sur l’ensemble du territoire et accessible aux entreprises de toutes tailles. Des formations sont à envisager car on entre dans le domaine de l’intégration de systèmes, et le marché va encore évoluer. Il nécessite une véritable approche marketing, avec une vraie stratégie de communication pour bien expliquer les prestations aux clients.
L’installation d’infrastructures de recharge des véhicules électriques (IRVE) constitue un marché clairement en développement, même s’il demeure encore confidentiel. Certains de nos adhérents s’y sont spécialisés, et aident même leurs clients à remplir les dossiers d’aides, notamment les CEE. Le marché va encore se développer fortement pour deux raisons : l’installation des IRVE doit être évoqué dans les AG annuelles de copropriétaires, et chaque copropriétaire a un « droit à la prise » : le propriétaire qui souhaite faire installer une IRVE ne peut se le voir refuser par la copropriété. A noter que ce segment nécessite une qualification « Qualifelec IRVE ».
La fibre optique, quant à elle, est évidemment un marché potentiel, puisqu’elle est actuellement en phase de déploiement. Mais ce dernier, un peu comme pour le compteur Linky, a échappé aux électriciens. Ceci étant peut-être dû à des conditions de déploiement trop rapides et non satisfaisantes. Mais nous attendons le raccordement de la fibre chez les particuliers et dans le tertiaire qui, elle, va représenter un marché considérable.
Enfin, en ce qui concerne les réseaux de communication, nous sommes face à un marché d’intégration, qui nécessite des compétences complémentaires à celles de l’électricien « traditionnel ». Nous devons mettre en œuvre des processus de formation continue, et certains CFA commencent à les intégrer dans leurs programmes. De notre côté, nous sommes en train de bâtir un référentiel de formation pour les entreprises sur ce sujet.
Parlez-nous de votre projet de Lab
Plus qu’un projet, c’est une action qui est déjà en cours. L’objectif est de créer, dans nos locaux pour le moment mais aussi de manière virtuelle, un parcours de visite décrivant concrètement les différentes facettes des métiers de l’électricité et les dernières innovations dans les logements et dans le secteur tertiaire. Nous y travaillons avec 23 partenaires (industriels de la profession, IRVE, systèmes anti-intrusion…), pour pouvoir montrer concrètement les potentialités de notre profession. Il ne s’agit évidemment pas d’en faire un musée, mais bien une exposition concrète, évolutive, dont les installations seront régulièrement renouvelées par les partenaires. Elle sera mise en œuvre fin 2019, avec l’ambition, à terme, de pouvoir présenter ce grand « show-room » évolutif à nos adhérents, à des écoles, à des décideurs, à la presse, pour leur faire prendre conscience des enjeux et des potentiels de notre profession.
C’est également une manière de comprendre ce que sera le marché de l’électricité dans les années qui viennent. Puisque nous savons déjà que si, à court terme, la croissance du secteur va un peu ralentir, nous pouvons compter sur l’agilité des entreprises pour s’adapter. Par contre, à plus long terme, la lutte contre le changement climatique et pour les économies d’énergies va avoir des implications importantes pour nos métiers, car la réduction de l’empreinte écologique de nos activités va forcément bénéficier à l’électricité. En ce sens, notre secteur a un bel avenir.
Pouvez-vous nous présenter la FFIE en quelques mots ?
La Fédération française des entreprises de génie électrique et énergétique regroupe 5400 entreprises de toutes tailles (TPE, PME, ETI et majors) dans le secteur de l’installation de systèmes électriques dans les bâtiments résidentiels, tertiaires, industriels, en neuf, en entretien et en maintenance.
- La FFIE est une organisation implantée sur tout le territoire français et poursuit plusieurs objectifs :
- être à l’écoute de nos adhérents pour bien cerner leurs besoins, leurs demandes, et leurs difficultés ;
- être le porte-parole des entreprise dans les territoires ;
- être acteur sur les sujets importants de notre profession, via des actions de lobbying ;
- être en veille sur les tendances pour accompagner les mutations actuelles et identifier les marchés de demain ;
- fournir les outils pour mettre en place une approche « marketing » de l’électricité. C’est un monde très technique, mais l’arrivée de nouveaux acteurs plus « managers » et « gestionnaires », est en train de le transformer en profondeur ;
- et participer aux travaux de normalisation.