Dans le cadre du plan de relance, la Banque des Territoires met à disposition des collectivités et des organismes de logement social une enveloppe de 13,5 milliards d’euros pour financer les actions de rénovation énergétique et le développement des EnR. Au-delà de l’enveloppe elle-même, l’accompagnement passe également par des dispositifs innovants tels que l’intracting. Entretien avec Hubert Briand, responsable du pôle Efficacité Énergétique des Bâtiments de la Banque des Territoires.
Quelle est la clé pour massifier la rénovation énergétique des bâtiments publics ?
Les solutions de financement sont aujourd’hui nombreuses, mais aborder le sujet sous l’angle purement financier est une erreur. Le risque est de financer des tranches de budget d’investissement et de ne pas placer les projets de réhabilitation dans une approche globale intégrant les besoins de renouvellement, la mise conformité, les économies de fonctionnement et la qualité d’usage.
Prendre le sujet dans le bon sens consiste à suivre six grandes étapes : comprendre l’importance du sujet ; auditer son patrimoine et identifier les besoins ; bâtir une stratégie patrimoniale et planifier les investissements ; définir les modalités opérationnelles et les meilleurs montages ; mobiliser les ressources adaptées pour passer à la réalisation ; et enfin piloter et mesurer les gains d’efficacité énergétique. Le vrai sujet à l’heure actuelle est donc d’accompagner les collectivités dans ce parcours, afin de concevoir le projet le plus efficient.
Comment la Banque des Territoires sensibilise-t-elle les collectivités ?
Nous avons développé plusieurs outils pour guider les collectivités tout au long de leur parcours. Le service en ligne “Mon comparateur énergétique”, par exemple, permet d’évaluer la performance énergétique du patrimoine d’une commune et de la comparer à la moyenne des communes partageant des caractéristiques similaires, comme la taille et la zone climatique. Nous avons par ailleurs développé un outil de cartographie (Prioréno) qui utilise les fichiers fonciers et différentes bases de données afin de localiser les bâtiments et identifier leur consommation.
La Banque des Territoires expérimente également des programmes spécifiques de financement de l’ingénierie et de la maîtrise d’œuvre, postes sur lesquels les collectivités modestes ont un véritable besoin. C’est le cas notamment du “Plan 1 000 écoles”, qui vise sur deux ans à accompagner la rénovation d’un bâtiment éducatif sur sept dans les villes du programme « Action cœur de ville » grâce au financement (jusqu’à 100 %) des études définissant le programme de travaux. Sur ce même sujet, on peut également citer “Autodiagnostic 360”, qui a pour ambition d’imaginer l’école de demain en intégrant les technologies du numérique et des moyens pédagogiques novateurs aux projets de rénovation énergétique.
Avec l’intracting, vous proposez une nouvelle approche pour financer et programmer les travaux. Comment ce dispositif fonctionne t-il ?
C’est un dispositif issu de la notion de coût global, sorte de CPE* interne (internal contracting), que l’on a importé d’Allemagne qui l’expérimente depuis plus de 20 ans. Le constat préalable est que dans la comptabilité publique, il y a une séparation stricte entre dépenses de fonctionnement et dépenses d’investissement. Avec l’intracting, l’idée est de briser (analytiquement) cette logique afin de pouvoir prioriser les travaux en fonction des économies que l’on peut obtenir. Le service financier définit un budget d’investissement qui finance des opérations de rénovation énergétique et les économies générées sont réinvesties dans de nouveaux travaux.
L’intracting vise donc des retours sur investissement rapides permettant d’enclencher un processus vertueux d’amélioration des performances énergétiques, les économies obtenues alimentant la ligne budgétaire ainsi créée. Ce dispositif nécessite un pilotage, une évaluation des actions et un suivi précis, impliquant étroitement les services financiers et les services techniques. Sa mise en place permet de préparer avec toutes les équipes des projets de plus en plus importants, notamment dans le but de répondre aux obligations du décret Tertiaire.
La Banque des Territoires a repris ce modèle en proposant aux universités, puis aux hôpitaux et aux collectivités, d’adapter ce budget analytique et ce process vertueux. Nous proposons de financer les travaux jusqu’à 100 % du besoin en avances remboursables à un taux fixe de 0,25 %, dans la limite d’un financement de 5M€ sur une durée de 13 ans maximum.
À l’occasion du plan de relance, nous avons sophistiqué la méthodologie de l’intracting avec deux autres formules :
– « l’intracting sécurisé », la Banque des Territoires finance des travaux sous forme de CPE*. La convention (13 ans maximum) permet un financement à taux zéro et un co-financement des études d’ingénierie, en contrepartie du partage des CEE** générés par l’opération.
– « l’intracting mutualisé » qui permet de donner les moyens financiers aux EPCI et aux syndicats d’énergie, en tant que mutualisateurs, de massifier la rénovation énergétique des bâtiments publics. La mutualisation des actions de rénovation énergétique (études, travaux, financement, suivi) a été rendue possible par une évolution législative dans la loi Énergie-Climat.
* Contrats de performance énergétique
** Certificats d’économie d’énergie