La rénovation énergétique du parc de bâtiments existants en France est une priorité pour atteindre nos objectifs en termes de réduction des consommations d’énergie. Parmi la variété des typologies de bâtiments et des maîtres d’ouvrage concernés par la rénovation de leur patrimoine, les logements en copropriétés et les spécificités associées à ce secteur en font une cible particulièrement intéressante à traiter dans le cadre du programme de rénovation des logements.
Tout d’abord, les projets de travaux en copropriétés sont souvent difficiles à initier pour les deux raisons principales suivantes : la gouvernance déconcentrée et les capacités d’investissement limitées. En effet, pour le premier point, la cohabitation de nombreux acteurs en fait une structure complexe à gérer. Les décisions d’investissement dans des travaux doivent refléter la volonté de l’ensemble des parties prenantes : résidents, bailleurs et locataires. Cette division de la maîtrise d’ouvrage complexifie nécessairement le processus décisionnel démocratique, qui a lieu lors de l’assemblée générale du syndicat des copropriétaires. En revanche, dans le cadre de la loi A.L.U.R., la mise en place d’un fonds travaux devrait permettre de répondre, en partie du moins, au problème des capacités de financement limitées des copropriétés. De plus, ce fonds travaux est une excellente mesure pour accroître l’autonomie budgétaire des copropriétés vis-à-vis de leurs créanciers habituels (utilités, banques).
Ensuite, le contenu des travaux que peut lancer une copropriété est un facteur de première importance qui déterminera l’adhésion au projet ou non des parties prenantes. En effet, pour un projet d’investissement de la copropriété, les aspects énergétiques, bien qu’incontournables, ne peuvent pas seuls faire l’objet de la rénovation de l’immeuble. Toute rénovation doit intégrer les problèmes de structure, de clos couvert, ainsi que les équipements techniques et de confort de l’immeuble. L’efficacité énergétique est donc une problématique transversale qui doit par conséquent être abordée de façon globale. Vient évidemment s’ajouter une dimension sociale essentielle, puisque la performance énergétique de la rénovation dépendra forcément du comportement des occupants. C’est cette performance énergétique améliorée qui viendra in fine renforcer la valeur verte de l’immeuble, et ainsi la valeur patrimoniale de la copropriété. La bonne cohésion du bouquet de travaux déterminera la cohésion du projet d’investissement dans son ensemble. C’est ainsi qu’il convient de considérer l’accompagnement contractuel de la rénovation sous forme d’une Contractualisation de la Performance Patrimoniale et Energétique (CPPE).
Sur le plan financier, ce montage contractuel s’appuie sur le remboursement des prestations sur la base des économies d’énergie réelles mesurées après travaux et constatées sur les factures d’énergie. Ce modèle peut également prévoir de faire entrer un tiers investisseur dans le montage du projet, permettant ainsi à la maîtrise d’œuvre de s’affranchir de l’apport en capital initial, qui constitue bien souvent un obstacle au démarrage des projets.
Le Bilan Initial de Copropriété (le BIC), que l’ARC propose d’accompagner, est la première étape sur laquelle le projet de rénovation doit s’appuyer. A partir de ce diagnostic initial, le conseil syndicat peut constituer un comité de pilotage dédié au montage du projet de rénovation. Ce comité de pilotage, composé de droit par le syndicat, le conseil syndical et par tout sachant copropriétaire volontaire, élabore un projet de CPPE qui comprendra notamment la mise en œuvre de l’audit global en vue de rédiger l’appel d’offres. Peut ensuite s’engager une démarche incrémentale de montage de projet de rénovation dans laquelle conception par un bureau d’étude thermique et maîtrise d’œuvre doivent s’associer au plus tôt, en garantissant le respect des compétences respectives et des intérêts de l’ensemble des parties prenantes énumérées plus haut. Ainsi, la rénovation patrimoniale et énergétique doit être un processus partagé dans la durée par de nombreux acteurs. La CPPE permet un accompagnement contractuel dans le temps des parties prenantes engagées dans ce projet.
Afin d’assurer l’accès aux solutions d’efficacité énergétique les plus compétitives disponibles sur le marché, il faut veiller à ce que l’appel d’offres ne comporte aucune prescription technique, de façon à favoriser la créativité et l’innovation des entreprises. A contrario, une plus grande souplesse dans les modalités et conditions spécifiées par l’appel d’offres sera la garantie d’une plus grande variété de solutions proposées, permettant à la maîtrise d’œuvre de conserver un plus grand pouvoir décisionnel, notamment sur la mieux-disance des offres. De plus, comme recommandé par le CGDD (Commissariat Général au Développement Durable) en 20101 , la fourniture d’énergie ne doit pas figurer dans l’appel d’offres en services d’efficacité énergétique : ces compétences doivent faire l’objet de contrats strictement séparés avec des prestataires aux compétences bien différenciées. Cela permet à un panel très large de PME spécialisées dans les services d’efficacité énergétique (génie électrique, génie climatique, BTP, etc.) de proposer leurs solutions innovantes afin de garantir les économies en volume d’énergie finale consommé.
D’un point de vue plus macro-économique, grâce au partenariat des industriels sur une approche en coût global par les solutions de gestion active de l’énergie, la CPPE en copropriété pourrait même être un levier fort d’innovation et de compétitivité et par là-même un vecteur de relance pour tout un tissu de PME locales, indépendantes des groupes fournisseurs d’énergie. Les technologies de gestion active permettent également d’offrir des garanties sur la pérennité de la performance des rénovations, grâce à l’automatisation optimisée des usages énergétiques. Ces technologies, par leur intégration au cœur des logements, ont également une dimension pédagogique intéressante à l’égard des occupants, ce qui leur permet une meilleure appropriation de la performance énergétique de la copropriété, avec des retombées comportementales notables sur les volumes de consommation.
En conclusion, la Contractualisation de la Performance Patrimoniale et Energétique doit être conçue comme un outil pour concilier les intérêts de toutes les parties prenantes de la copropriété derrière un projet commun. Elle permet d’accompagner la rénovation globale d’une copropriété en intégrant les problématiques énergétiques au cœur du projet, mais également en assurant la valorisation patrimoniale des travaux effectués et de la performance finale sur la valeur verte de la copropriété.