Depuis quelques mois, plusieurs collectivités ont mis en place un service de prêt de caméra thermique aux habitants. L’objectif est clairement annoncé : il s’agit de sensibiliser la population pour améliorer l’isolation des bâtiments, réduire les consommations énergétiques et, du même coup, les dépenses des ménages.
Le principe est simple : moyennant généralement une caution, la municipalité prête une caméra thermique aux habitants, qui sont sensés faire fonctionner la caméra thermique chez eux pour mettre en évidence les déperditions de chaleur et repérer les défauts d’isolation.
L’idée est de prendre des photos de tout ce qui ressemble de près ou de loin à des « anomalies », certaines communes offrant ensuite la possibilité de montrer les images téléchargées à des professionnels.
Or, si le souhait d’améliorer les performances énergétiques des logements est un objectif auquel l’AFTIB adhère totalement, la démarche de prêter du matériel professionnel semble risquée alors même qu’architectes et ingénieurs, entre autres, doivent se former à l’utilisation de cette technique.
Comme l’atteste nos exemples d’études de cas dans chacune de nos newsletters, la difficulté réside entièrement dans l’analyse et l’interprétation des images photographiées par les caméras thermiques.
Cela exige de connaître les propriétés liées à l’outil et avoir des connaissances sur le comportement thermique, aéraulique et hydraulique du bâti, mais également de maîtriser les nombreux pièges qui peuvent totalement modifier les résultats.
De surcroît, aucun professionnel sérieux ne pourra établir de diagnostic, voire même conseiller un particulier à la seule consultation de ses thermogrammes. En effet, ignorant tout des conditions dans lesquelles ces dernières ont été prises (ex. quelles sont les conditions météorologiques, y a-t-il des ombres portées ou une ventilation à proximité, etc.), il est rigoureusement impossible de porter le moindre jugement avec certitude.
Au final, à de rares exceptions près (ex. pont thermique au niveau d’escaliers/paliers ou nez de dalle assez caractéristiques), le particulier n’est guère plus avancé, avec comme seule réponse possible qu’il y a peut-être des déperditions, ne pouvant en aucun cas être traitées comme telles tant qu’un professionnel ou un opérateur en thermographie n’a pas effectué une vérification sur place.
Le risque de mettre une caméra thermique entre toutes les mains est donc triple :
- Inquiéter un particulier qui va voir des fuites partout alors que ce n’est pas forcément le cas. Il risque alors de se précipiter pour faire appel à un professionnel et apprendre qu’il n’y avait pas lieu de s’alarmer suite à une mauvaise interprétation des photos à la caméra thermique – pouvant générer un sentiment d’avoir été leurré par un outil qu’il ne maîtrise pas.
- Rassurer, à tort, un particulier qui ne décèle aucune anomalie alors même que des défauts d’isolation sont présents.
- Encourager un particulier à faire des travaux pas forcément nécessaires ou adaptés.
Pour ces raisons, l’AFTIB déconseille ce type de prêt qui ne fait que desservir les particuliers et affecte la bonne intention initiale des collectivités.
Pour en savoir plus :
Bien choisir sa caméra infrarouge