Nous avons parlé plusieurs fois de la température d’environnement radiatif, TER, au cours des articles précédents. Cette notion a autrefois été mal comprise par les constructeurs de caméras qui ont inventé nombre de désignations masquant mal leur ignorance. Certaines caméras et logiciels en conservent des vestiges. L’expression température d’environnement, introduite par M. Pajani vers 1983, a été complétée par le mot radiatif, du fait des significations qu’a progressivement prises le mot environnement dans le langage courant.
EXPLICATIONS
L’environnement radiatif de la scène observée est constitué de tout ce qui envoie du rayonnement sur la scène ; ce rayonnement, en provenance de l’hémisphère vu par la scène, va partiellement se réfléchir sur cette scène.
La température d’environnement radiatif est la température apparente correspondant, par la courbe d’étalonnage de la caméra, à la moyenne des rayonnements incidents sur la scène observée, pourvu que ces rayonnements ne soient pas de valeurs trop éloignées (comme exemple, en intérieur, le plafond, les parois verticales et le sol sont à des températures très proches ; en extérieur, les rayonnements sont le plus souvent très divers).
Voilà pourquoi certains parlent de température apparente réfléchie, TAR, terminologie concentrée presque impropre.
Ce qui est appelé communément température intérieure (ou extérieure) est la résultante de la TER et de la température ambiante (ou température d’environnement convectif).
CE QUE NOUS VOYONS AVEC NOS YEUX ET CE QUE VOIT LA CAMERA THERMIQUE
Document A – photographie d’un pavillon rénové avec ITE et deux types de bardage (zinc traité gris et bois).
Contrairement à la photographie, la thermographie est destinée à l’interprétation ; il est fondamental, sous peine d’erreur d ‘interprétation, de bien comprendre d’où viennent les rayonnements qui constituent l’image thermique, ceux qui sont émis, ceux qui sont réfléchis et de quel environnement radiatif proviennent ces derniers. C’est la première phase de l’interprétation des images en thermographie : l’interprétation thermographique. Phase trop souvent escamotée pour sauter aussitôt à l’interprétation thermique.
LA THERMOGRAPHIE SUR LES MATERIAUX DIFFUSANTS (= DE TYPE 1) EST DE COMPREHENSION IMMEDIATE.
Nous avons déjà parlé des matériaux diffusants et des matériaux spéculaires. Les matériaux diffusants sont d’interprétation thermographique immédiate, ce qui permet de passer rapidement à l’interprétation thermique.
MAIS LA THERMOGRAPHIE SUR LES MATERIAUX SPECULAIRES (= DE TYPE 2) EST PLUS DELICATE.
Lorsque la scène est spéculaire pour nos yeux ET pour la caméra thermique, il est assez facile de repérer quelle est la partie d’environnement radiatif qui se réfléchit sur la scène observée (sous un angle choisi) : on voit l’environnement dans le « miroir » qu’est la scène observée, comme c’est le cas des vitrages. C’est cette partie d’environnement qui définit alors la TER à prendre en compte dans un calcul de température vraie (ce calcul est rarement nécessaire). Mais pour les calculs de thermique du bâtiment, la TER est identique à celle des matériaux diffusants ; en effet, les rayonnements absorbés par les surfaces spéculaires proviennent de l’ensemble de l’hémisphère vu par la scène observée !
Par contre, quand la scène observée est diffusante pour nos yeux ET spéculaire pour la caméra thermique (métaux traités par exemple), il est moins évident de déterminer quel est l’environnement radiatif de la scène et donc de fixer la valeur de la TER en thermographie. On n’a pas de problème pour la TER à utiliser en thermique.
Document B – thermographie du pavillon où le zinc apparaît à -16°C et le bois à -2°C alors qu’ils sont à la même température vraie de l’ordre de +1°C. La TER thermographique du zinc est d’environ -45°C (zone du ciel découvert), la TER du bois est d’environ -20°C (moyenne de l’hémisphère vu par la façade). La TER de la thermique serait également de -20°C mais les températures du sol et du ciel sont trop différentes pour que les calculs de thermique statique du bâtiment « fonctionnent ». Il est plus facile de repérer la TER des vitrages (différentes zones du ciel) que celle du zinc, très chaotique du fait de ses ondulations.
(Ces 2 documents ne datent pas du même jour. Ils sont commentés extensivement dans l’ouvrage « La thermographie du bâtiment » à paraître chez Eyrolles au premier trimestre 2012.)
La thermographie a rarement besoin de connaître la valeur de la TER, les températures vraies étant peu utiles (il faut donc laisser la caméra « en roue libre », avec émissivité = 1 et TER indifférent ; inhiber aussi le calcul du facteur de transmission atmosphérique, sans intérêt).
La TER est indispensable en calcul de thermique du bâtiment :
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- elle ne dépend pas du type de réflexion de la scène observée ;
- elle doit concerner un environnement radiatif aussi uniforme que possible (ciel froid et soleil sont interdits, avant et pendant les mesures) ;
- elle peut se mesurer, avec une caméra thermique, sur un catadioptre (réflecteur diffusant dans la bande spectrale de la caméra) placé sur la scène (pourvu que l’émission spectrale de l’environnement soit assimilable à celle d’un corps noir – absence d’éclairement solaire, même indirect). Nous reparlerons de cet outil dans l’avenir.