Entretien croisé avec Guillaume David, installateur en photovoltaïque ; David Bouchoucha, intégrateur en domotique ; et Dominique Naert, président de l’IUT de Marne La Valley.
Quelles compétences doivent développer les électriciens et leurs collaborateurs pour répondre aux enjeux de la transition numérique et énergétique ?
Guillaume David, président de la société Solstyce, spécialisée dans l’installation photovoltaïque.
Dans le métier du photovoltaïque, la principale compétence de l’électricien est de pouvoir s’adapter à des exigences clients et à des réponses techniques nouvelles. Un chantier n’est jamais similaire à un autre, nous devons systématiquement mettre en place des solutions sur mesure. Nous devons également nous intéresser à une vision énergétique globale car nous sommes en interface avec les problématiques de gestion du réseau électrique et de la consommation du bâtiment. Ces problématiques demandent des échanges et des compétences, aussi bien du côté du courant fort que du courant faible. Autre particularité dans notre métier du photovoltaïque : nous devons développer des compétences liées à l’enveloppe du bâtiment. Ce sont des compétences qu’un électricien traditionnel n’a pas mais qui sont indispensables dans notre métier. Mes salariés ont ainsi une casquette d’électricien, mais aussi de couvreur, de charpentier, de serrurier, ou encore d’étancheur – et sont capables de conduire des travaux dans les règles de l’art.
Dominique Naert, président de l’IUT de Marne La Valley et ex-directeur du CSTB d’Ile-de-France
Avec des bâtiments de plus en plus numérisés et intelligents, les électriciens deviennent les pilotes de l’ensemble de la construction. Ils devront être compétents en production énergétique, en domotique et dans ce qui va arriver dans le futur car les bâtiments ont une longue durée de vie et sont de plus en plus évolutifs. Les allemands parlent d’électriciens 4.0, capables de d’intervenir jusqu’à l’intelligence artificielle. C’est un domaine qui devrait se développer dans les dix prochaines années. Les futurs chantiers verront sans doute intervenir non plus des ingénieurs d’études mais des ingénieurs d’application, qui reviendront sur le terrain. D’autres compétences sont à développer, notamment dans les domaines des réseaux informatiques, de la numérisation, de la 3D, de la simulation et des statistiques. Le traitement des données est aussi un sujet important car les données ne sont actuellement pas fiables, par manque de compétences. La complexification du bâtiment nécessite une qualité que nous n’avons pas encore. Et l’électricien sera le chef d’orchestre de tout cette mutation.
Albert Bouchoucha, installateur et dirigeant de Domotizy
En ce qui concerne la domotique, deux choix s’offrent aux électriciens. Soit ils se forment sur les trois volets qui composent la domotique – le câblage, l’intégration et la maintenance ; soit ils travaillent en binôme avec un domoticien afin que l’installation puisse être pérenne, évolutive, ni sur-dimensionnée, ni sous-dimensionnée. Il est très important de connaître ses limites d’intervention. La partie câblage est la plus importante pour l’électricien : une formation complète est indispensable, notamment auprès des bureaux d’études. Si le câblage est parfaitement réalisé, il n’y aura quasiment pas de maintenance derrière. Le domoticien est quant à lui plus pertinent sur la partie paramétrage, intégration et programmation. Si un électricien se lance sur ce volet, il doit impérativement se former aux protocoles de communication.
Interview réalisée dans le cadre de la Conférence des Électriciens de demain